Zofia Duszynska, l’une des meilleures solicitors, en conférence à l’Université de Lille.
Par Cassandre Delhoye
Ce 19 janvier, la faculté des sciences juridiques politiques et sociales a reçu une grande avocate anglaise entre ses murs dans le cadre d'une conférence sur les dysfonctionnements du droit d'asile au Royaume-Uni.
![ Zofia Duszynska -© Duncan Lewis Solicitors](https://26694ce817.cbaul-cdnwnd.com/774618f3863daef5a9bf1fc51441adaf/200000026-298e8298eb/7522.jpeg?ph=26694ce817)
Elle a été présentée aux auditeurs, par le Professeur Louis De Carbonnières, comme étant l'une des cinq cents meilleurs solicitors du Royaume-Uni, à savoir que l'on en compte plus de cent soixante mille dans le pays.
Elle est reconnue pour son engagement sans relâche dans les matières touchant au droit d'asile, à la torture, aux libertés et droits fondamentaux. Elle est, notamment, membre de l'organisation bénévole Refugee legal support qui propose une assistance gratuite en matière de demande d'asile à de nombreux réfugiés.
Le rôle du solicitor.
La question que l'on peut se poser est : « qu'est-ce qu'un solicitor ? ». Il faut savoir que, dans la plupart des États de Common law, la profession d'avocat est séparée en deux corps de métier : les barristers et les solicitors.
Pour être concis, le barrister est celui qui est appelé « avocat plaidant », il dispose du monopole de la plaidoirie, il est aussi habilité à rendre des consultations et des avis. Il a tout intérêt à travailler en compagnie du solicitor qui est celui qui représente et conseille ses clients, sa tâche est assez grande.
En effet, si nous devions faire un comparatif, il faudrait imaginer que le rôle du solicitor anglais se situe quelque part entre celui de l'avocat et du notaire français.
Les dysfonctionnements du droit d'asile au Royaume-Uni.
Au cours de la conférence, elle expliquera les difficultés nombreuses, et parfois insurmontables, liées à la procédure de demande d'asile au Royaume-Uni. Tout d'abord, la personne qui demande l'asile doit démontrer « une peur bien-fondée d'être persécutée » dans son pays d'origine, élément qui fait l'objet d'une appréciation subjective des autorités compétentes.
Aussi, le parcours judiciaire qu'il faut réaliser pour obtenir l'asile se trouve être particulièrement long. C'est un parfait labyrinthe, chaque décision vient en contradiction de la précédente, et chaque décision conduit à une juridiction différente : en temps normal, il faut compter plus d'un an afin d'obtenir un premier jugement. Elle expliquera également que la procédure d'appel est encore plus longue et plus compliquée qu'en première instance.
Selon ses mots, le système britannique est un « broken system », c'est-à-dire, un système brisé. Par la longueur des délais d'abord, six mois pour avoir une première audition, puis six mois de plus pour obtenir un jugement.
Elle expliquera que certaines personnes attendent depuis 2020, des personnes venant, par exemple, du Soudan, de Syrie ou encore du Yémen. De plus, leur situation est particulièrement précaire : ils arrivent sur des bateaux encombrés menaçants à chaque instant de sombrer. Il faut aussi considérer l'augmentation considérable des prix de l'hébergement pour les demandeurs d'asile.
Le gouvernement britannique a par ailleurs adopté une politique « stop the boats », allant alors contre les positions de la Cour européenne des droits de l'Homme.
La puissante motivation d'une femme.
- Quelle a été votre motivation pour vous spécialiser dans le droit d'asile ?
Elle répondra que son père était un réfugié et qu'elle a grandi à l'ouest de Londres, au milieu de nombreux réfugiés. Elle vivait alors dans une sorte de communauté, entourée de gens qui avaient également perdu beaucoup : leur famille, leur pays, etc. À l'origine, quand elle a voulu devenir avocate, elle souhaitait exercer dans le droit immobilier.
À la fin de ses études de droit en Suisse, elle s'est aperçue que l'immigration était un sujet qui l'intéressait bien plus. Elle considère que travailler afin d'aider les réfugiés était un emploi taillé sur mesure pour elle, qu'elle était en mesure de le faire plus que quiconque. En effet, elle explique qu'elle comprend d'où ils viennent, elle comprend leur passé, elle comprend ce qu'ils ont vécu, elle comprend ce qu'ils ressentent : elle sait ce que cela veut dire de tout perdre, ils n'ont pas le choix que de tout recommencer à zéro.
C'est avec cela qu'elle a commencé, avec son passé et dans le but de les aider et de leur rendre la vie un peu plus facile, en l'honneur de son père.
Elle expliquera également qu'elle est contente de faire ce qu'elle fait aujourd'hui, elle explique que ces personnes n'ont rien, mais ce sont des personnes très généreuses : elle a l'impression qu'ils lui rendent au centuple ce qu'elle fait pour eux. Elle expliquera, pour l'anecdote, que lorsqu'elle est malade, certains lui ont proposé de s'occuper de ses enfants : de les conduire à l'école et d'aller les rechercher.
![Zofia Duszynska, amphithéâtre René Cassin - © X](https://26694ce817.cbaul-cdnwnd.com/774618f3863daef5a9bf1fc51441adaf/200000028-7033a7033c/Zofia%202.png?ph=26694ce817)